Missa sine Nomine.
Ernst Wiechert.
Quels sont, vraiment, les personnages de ce roman ? Peut-être ces trois frères, si intimement liés l’un à l’autre, et dont les vies ont pourtant été si différentes ; ce Christophe, cocher, passeur, gardien, dont le nom rappelle celui qui, selon la légende, portait l’enfant Jésus sur son épaule pour lui faire traverser le fleuve ; cette « jeune fille » qui va traverser leurs destins ; ce Jacob, rescapé du massacre mais dont toute la famille a disparu dans l’abime, trafiquant de petits cadeaux qui manifestent l’amitié mais aussi de services toujours rendus avec délicatesse et à propos ; et tous les autres dont les noms sont à peine prononcés qui vont accompagner ce récit de cinq cent pages écrit dans une langue splendide et souvent recherchée, d’où se dégage une « harmonie parfaite » comme l’écrivit Marcel Brion dans Le Monde.
Je cherchais quelque chose à lire. J’ai parcouru les rayonnages, d’un œil distrait. Et j’ai donc trouvé ce livre, acheté il y a bien longtemps (en novembre 1971, c’est noté dedans) mais que je n’avais jamais lu. J’avais bien essayé deux ou trois fois de m’y mettre, mais il m’était tombé des mains. On n’entre pas dans un livre sans désir.
Et voilà que je sors d’Orwell, de Fallada, de Mendelsohn, et que ce livre situe l’action quelque part en Allemagne, dans les mois qui suivent la Seconde Guerre mondiale, et parle – et fait parler – des hommes et des femmes venus, ou plus exactement chassés, de ces lointaines contrées de Prusse orientale (aujourd’hui russe, enclave de Kalinigrad, anciennement Königsberg), ces pays germains aux confins du monde slave.
J’ai donc ouvert ce livre, je l’ai parcouru comme on suit un itinéraire, suivant le conseil de René Lalou dans Les Nouvelles littéraires : « Pour en saisir la beauté, il convient de le lire sans hâte, en s’y laissant envoûter. »
Missa sine Nomine. Ernst Wiechert. Calmann-Lévy, éditeur. Paru dans le livre de poche, 6, avenue Pierre Ier de Serbie, Paris. (imprimé chez Union-Rencontre, Mulhouse. Illzach. Haut-Rhin).